Les hommes en séance, tout un poème

Certes, c'est un public très peu représenté dans ma clientèle mais ça n'empêche que certains valeureux osent passer la porte de ce monde étrange, celui des émotions et du corps. Ils m'ont inspiré un article. Je vais vous brosser le portrait de ces intrépides, souvent envoyés par une femme de leur vie (compagne, amie, soeur,...) qui viennent à ma rencontre.

Les sceptiques :

Ceux qui représentent la grande majorité de ma clientèle masculine. Un peu mal à l'aise, ils m'expliquent que c'est leur première fois (j'adore être celle de la première fois, celle qui initie, qui montre la voie, ah ah), qu'ils sont plutôt cartésiens et qu'à la base, ils croient pas à tout ça mais qu'une personne (une femme souvent) leur a conseillé de venir. Je dois toujours me retenir de leur dire : "oh, vous êtes pas là pour le soin de guérison avec les archanges? " Mais tant que je n’ai pas la garantie qu'on a le même humour, je m'abstiens.

Et vous savez quoi ? En général, ça se passe super bien. Parce qu'on peut être cartésien sans être fermé, on peut avoir choisi d'expérimenter tout en restant vigilant. Être sceptique, c'est savoir rester critique et ne pas croire aveuglément à ce qui nous est proposé, donc pour moi, c'est toujours positif.

Les taiseux :

Ceux qui vont prononcer maximum 5 phrases pendant toute la séance, y compris le bonjour et le au revoir. Souvent, c'est leurs partenaires qui me les envoient et qui les ont rassurés sur le fait qu'ils ne seront pas obligés de parler. Sinon soyons honnête, ils ne seraient pas là. Même si ces séances sont extrêmement silencieuses, la magie opère parfois et je pense sincèrement que cela en a apaisé certains. Même s'ils ne m'ont rien dit, évidemment.

Les bunkers :

Ceux qui ont érigé tout un système de défense que peu (voire personne) n'a jamais eu le privilège de traverser. Souvent, je commence ma séance avec l'impression d'être dans le viseur d'un tireur d'élite, un pas de travers et je suis dehors. C'est un travail d'équilibriste de gagner leur confiance, de respecter ce besoin de protection tout en essayant d'ouvrir une petite brèche. Ce sont très souvent des hommes avec une intelligence émotionnelle incroyable mais qui, pour survivre, ont tout planqué derrière un masque de virilité. En vrai, je mets en moyenne 2-3 ans pour gagner leur confiance et arriver à l'entrée de bunker. Et quand j'y suis, je découvre une vue à couper le souffle et des personnes d'une beauté incroyable. Si seulement, ils arrêtaient de se cacher...

Les éveillés :

Mmh comment les décrire avec justesse. Ce sont des spécimens plutôt rare mais tout aussi fascinant. Eux m'expliquent qu'ils ont vécu des choses difficiles dans leur vie mais que grâce à la spiritualité, ils ont enfin compris qui ils étaient et leur mission de vie, ici sur terre. Bref, ce sont des éveillés qui baignent dans la lumière et qui sont là pour montrer la voie aux autres. Ils font des soins gratuits (baih oui, ils ont tellement à offrir et puis, l'argent c'est tellement capitaliste). En vrai ? Ils traînent plus de casseroles émotionnelles que tous ceux réunis avant mais eux, ils sont dans la lumière maintenant... ou pas!

Les Apollons :

Eux, ils arrivent comme des conquérants, se vautrent dans mon canapé, les jambes écartées et vont même jusqu'à se gratter les couilles devant moi (ceci est tout à fait véridique). Ils me déballent leurs diplômes pour m'impressionner, me montrent leurs portefeuilles remplis de gros billets, me racontent que bon, la kinesio c'est mignon tout ça mais que si c'était efficace, ça se saurait. Vous aussi, vous vous demandez pourquoi ils sont venus jusque chez moi ? Ah ah je vous comprends, mais les Apollons, ils aiment montrer qu'ils sont les plus forts, les plus beaux et les plus intelligents. Et ils aiment se sentir supérieur pour cacher à quel point ils se sentent impuissants. Ce qu'ils ne savent pas, c'est que je lis les corps et pas l'ego et que je peux y voir les failles et la souffrance. Parce qu'il y en a de la souffrance quand on veut humilier les autres pour se sentir important. Eux par contre, je choisis de ne pas les accueillir une deuxième fois, une me suffit.

Au delà de ces clichés qui prêtent à sourire, ce que je découvre chez les hommes que je rencontre, c'est qu'ils sont évidemment pareils que nous. Sauf que eux l'ignorent.

Si seulement ils pouvaient accueillir la sensibilité, la douceur et la fragilité que j'aperçois chez eux comme un cadeau plutôt que comme un fardeau, le monde irait tellement mieux.

Si seulement ils pouvaient prendre soin d'eux comme les personnes importantes qu'ils sont, leur entourage irait mieux.

Si seulement ils pouvaient s'ouvrir à la richesse de ce que leur offre leurs émotions, leurs enfants iraient mieux parce qu'ils trouveraient en eux un modèle équilibré.

Alors à chaque fois que j'en rencontre un, peu importe l'état d'esprit dans lequel il vient (et la pression qu'il a reçu pour arriver), je sais qu'une part de lui est ok de faire un premier pas sur ce chemin et je l'en remercie.

Voilà, je suis une soldate en terrain ennemi qui tente de traverser les lignes de la masculinité pour y planter la graine de la paix.

Concernant la confidentialité, soit le billet est inspiré de différentes rencontres de façon à garder l’intimité de ce qui est partagé en séance. Je mets néanmoins un point d’honneur à vous partager que du vrai, seul le contexte change. Soit la personne a lu ces mots avant de me donner son accord pour que je partage son histoire.