Garagiste ou pépiniériste
- Caroline Dechamps
- 3 août
- 4 min de lecture
Vous ne le savez sûrement pas mais choisir le nom qui définit ma pratique a longtemps été un casse-tête (et l'est toujours un peu d'ailleurs). Comment trouver « LE » mot qui exprime ce que je peux vous offrir, qui donne envie sans vendre de fausses promesses ?
J’aimais bien “guérisseuse surpuissante aux dons illimités” mais apparemment, je suis la seule à l’apprécier à sa juste valeur. J’ai donc opté pour la version sobre : kinésiologue (même si j’ai pris quelques libertés avec la kinésiologie). Sauf qu’il semblerait que ça soit encore trompeur.
Comme d'habitude, je vous replace le contexte : on est fin de journée, j'ai déjà plusieurs séances dans les dents (ça ne m'empêche pas d'être efficace mais je reste humaine donc ça m'arrive d'être un chouïa moins disponible).
Il est 17h et c'est Agnès qui vient à ma rencontre. Le regard déterminé, prête à en découdre, elle commence par m'expliquer que j'ai fait des merveilles avec son bébé il y a 3 semaines (oui, oui, elle a vraiment dit ça). Suite à cela, elle a eu envie de venir pour elle.
Agnès m'explique en détail son enfance, les événements difficiles et l’impact sur son équilibre émotionnel dont elle est fermement décidée à s’en débarrasser…aujourd’hui même.
Dans l’absolu, je la rejoins à 100% et j’encourage toujours les personnes à prendre soin de leur vécu. Par contre, on risque de rencontrer quelques difficultés pour rentrer dans le timing…
Quand je me mets à l'écoute de son corps en posant mes mains sur son ventre, c'est d'abord une porte fermée que je vois. Ouïe, ça ne va pas faire son affaire…et quand j'arrive timidement à l'ouvrir, devinez ce que je vois ? Une deuxième porte fermée. C'est une symbolique que je retrouve régulièrement chez des personnes qui ont dû, surtout enfant, mettre des mécanismes en place pour se protéger de leur environnement et continuer à fonctionner.
J'explique à Agnès que ça nécessite beaucoup de temps et de patience pour aller débroussailler derrière ces portes, que l'enfant en elle a d'abord besoin de se sentir en confiance pour me laisser entrer et que je ne forcerais rien. Alors, oui sa tête a décidé d'avancer et c'est vraiment formidable mais son corps va avoir besoin d’un tout petit peu (voire beaucoup) de temps.
Je vous raconte même pas la vague de colère que j'ai senti monter dans ses tripes (et qui m'était adressée évidemment). C'était pas vraiment ce qu'elle avait envie d’entendre à cet instant précis.
Et là, c'est la fin de la journée pour moi, la fatigue se fait sentir et je sens que je me retiens très fort de lui dire : "Hé, il n’est pas écrit faiseuses de miracles sur mon front non plus". Je crois que parfois les gens pensent que je suis garagiste et qu'il suffit de venir déposer sa voiture pour que je fasse le diagnostic et la réparation tout ça en moins de deux heures.
En vérité, je la comprends Agnès parce qu'au fond, je suis un peu comme elle. Moi aussi, j'ai longtemps rêvé de trouver "le" professionnel qui allait me sauver de toutes mes emmerdes. 10 ans plus tard, j'en ai rencontré des dizaines, de tous les horizons mais aucun n'a fait de miracle (et pourtant, j'ai trouvé des pépites). Par contre, chacun d'eux a semé une petite graine en moi dont j’essaie vaille que vaille de prendre soin, je les arrose d’amour dans mes bons jours et je prie pour les voir s'épanouir en un beau jardin. Aujourd’hui, certaines ont éclos, d’autres sont encore sous terre et certaines parties de ma vie sont encore en friche.
Ces pros du développement personnel m’ont guidée, accompagnée mais ils ne m'ont rien enlevé parce qu'il n'y a que moi qui peut décider si je veux m'alléger ou pas de mes fardeaux. Et apparemment, je ne suis pas encore prête à tous les lâcher. #caarrivemêmeauxmeilleurs.
Comme eux, plutôt que d'être garagiste, fausse faiseuse de miracles déguisée en charlatan, j'ai choisi d'être pépiniériste pour essayer de faire pousser des petites graines en chacun d'entre vous. Alors oui, prendre soin de soi, de ses traumas et de ses croyances limitantes, cela prend du temps et beaucoup d'énergie. Je ne compte plus les centaines de fois où j'ai voulu arrêter. Je crois que pas plus tard qu’hier, j’ai eu envie de rendre mon tablier et de démissionner.
Et puis, l'espoir renaît timidement, comme si la vie en nous ne pouvait jamais s'arrêter de pousser 🌱
Je ne sais pas si je reverrais Agnès, si elle continuera son chemin ou pas. Quoiqu’elle décide, je souhaiterais lui dire qu’elle est une magnifique terre arable grâce à laquelle elle pourrait faire éclore le meilleur. Parce que même si je ne fais pas de miracles, le potentiel qui sommeille en chacun, je peux le voir.
Voilà, je suis une fleur rare, un mélange hybride entre une kinésio et une pépiniériste.

Concernant la confidentialité, soit le billet est inspiré de différentes rencontres de façon à garder l’intimité de ce qui est partagé en séance. Je mets néanmoins un point d’honneur à vous partager que du vrai, seul le contexte change. Soit la personne a lu ces mots avant de me donner son accord pour que je partage son

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